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constater, importantes en cela seulement, l’un des plus grands vices de l’esprit, qui est la désobéissance opiniâtre aux règles constitutives de l’art. Quelles sont les qualités, si belles qu’on les suppose, qui pourraient contre-balancer une si défectueuse énormité ? Quel cerveau bien portant peut concevoir sans horreur une peinture en relief, une sculpture agitée par la mécanique, une ode sans rimes, un roman versifié, etc. ? Quand le but naturel d’un art est méconnu, il est naturel d’appeler à son secours tous les moyens étrangers à cet art. Et à propos de M. Butté, qui a voulu représenter dans de petites proportions de vastes scènes exigeant une quantité innombrable de personnages, nous pouvons remarquer que les anciens reléguaient toujours ces tentatives dans le bas-relief, et que, parmi les modernes, de très-grands et très-habiles sculpteurs ne les ont jamais osées sans détriment et sans danger. Les deux conditions essentielles, l’unité d’impression et la totalité d’effet, se trouvent douloureusement offensées, et, si grand que soit le talent du metteur en scène, l’esprit inquiet se demande s’il n’a pas déjà senti une impression analogue chez Curtius. Les vastes et magnifiques groupes qui ornent les jardins de Versailles ne sont pas une réfutation complète de mon opinion ; car, outre qu’ils ne sont pas toujours également réussis, et que quelques-uns, par leur caractère de débandade, surtout parmi ceux où presque toutes les figures sont verticales, ne serviraient au contraire qu’à confirmer ladite opinion, je ferai de