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velours ! Le contour du visage, les ondulations de ce large front adolescent casqué de lourds cheveux, la richesse des lèvres, le grain de cette peau éclatante, tout y est soigneusement exprimé, et surtout ce qui est le plus charmant et le plus difficile à peindre, je ne sais quoi de malicieux qui est toujours mêlé à l’innocence, et cet air noblement extatique et curieux qui, dans l’espèce humaine comme chez les animaux, donne aux jeunes physionomies une si mystérieuse gentillesse. Le nombre des portraits produits par M. Ricard est actuellement très-considérable ; mais celui-ci est un bon parmi les bons, et l’activité de ce remarquable esprit, toujours en éveil et en recherche, nous en promet bien d’autres.

D’une manière sommaire, mais suffisante, je crois avoir expliqué pourquoi le portrait, le vrai portrait, ce genre si modeste en apparence, est en fait si difficile à produire. Il est donc naturel que j’aie peu d’échantillons à citer. Bien d’autres artistes, madame O’Connell par exemple, savent peindre une tête humaine ; mais je serais obligé, à propos de telle qualité ou de tel défaut, de tomber dans des rabâchages, et nous sommes convenus, au commencement, que je me contenterais, autant que possible, d’expliquer, à propos de chaque genre, ce qui peut être considéré comme l’idéal.