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De ceux-là chaque peuple en compte cinq ou six,
Cinq ou six tout au plus, dans les siècles prospères.
Types toujours vivants dont on fait des récits.

Théophile Gautier appelle cela une Compensation. M. Delacroix ne pouvait-il pas, à lui seul, combler les vides d’un siècle ?

Jamais artiste ne fut plus attaqué, plus ridiculisé, plus entravé. Mais que nous font les hésitations des gouvernements (je parle d’autrefois), les criailleries de quelques salons bourgeois, les dissertations haineuses de quelques académies d’estaminet et le pédantisme des joueurs de dominos ? La preuve est faite, la question est à jamais vidée, le résultat est là, visible, immense, flamboyant.

M. Delacroix a traité tous les genres ; son imagination et son savoir se sont promenés dans toutes les parties du domaine pittoresque. Il a fait (avec quel amour, avec quelle délicatesse !) de charmants petits tableaux, pleins d’intimité et de profondeur ; il a illustré les murailles de nos palais, il a rempli nos musées de vastes compositions.

Cette année, il a profité très-légitimement de l’occasion de montrer une partie assez considérable du travail de sa vie, et de nous faire, pour ainsi dire, reviser les pièces du procès. Cette collection a été choisie avec beaucoup de tact, de manière à nous fournir des échantillons concluants et variés de son esprit et de son talent.