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M. Glaize compromet ses débuts par des œuvres d’un style commun et d’une composition embrouillée. Toutes les fois qu’il lui faut faire autre chose qu’une étude de femme, il se perd. M. Glaize croit qu’on devient coloriste par le choix exclusif de certains tons. Les commis étalagistes et les habilleurs de théâtre ont aussi le goût des tons riches ; mais cela ne fait pas le goût de l’harmonie.

Dans le Sang de Vénus, la Vénus est jolie, délicate et dans un bon mouvement ; mais la nymphe accroupie en face d’elle est d’un poncif affreux.

On peut faire à M. Matout les mêmes reproches à l’endroit de la couleur. De plus, un artiste qui s’est présenté autrefois comme dessinateur, et dont l’esprit s’appliquait surtout à l’harmonie combinée des lignes, doit éviter de donner à une figure des mouvements de cou et de bras improbables. Si la nature le veut, l’artiste idéaliste, qui veut être fidèle à ses principes, n’y doit pas consentir.

M. Chenavard est un artiste éminemment savant et piocheur, dont on a remarqué, il y a quelques années, le Martyr de saint Polycarpe, fait en collaboration avec M. Comairas. Ce tableau dénotait une science réelle de composition et une connaissance approfondie de tous les maîtres italiens. Cette année, M. Chenavard a encore fait preuve de goût dans le choix de son sujet et d’habileté dans son dessin ; mais quand on lutte contre Michel-Ange, ne serait-il pas convenable de l’emporter au moins par la couleur ?