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M. Winterhalter est réellement en décadence. — M. Lépaulle est toujours le même, un excellent peintre parfois, toujours dénué de goût et de bon sens. — Des yeux et des bouches charmantes, des bras réussis, — avec des toilettes à faire fuir les honnêtes gens !

Mme O’Connel sait peindre librement et vivement ; mais sa couleur manque de consistance. C’est le malheureux défaut de la peinture anglaise, transparente à l’excès et toujours douée d’une trop grande fluidité.

Un excellent exemple du genre de portraits dont je voulais tout à l’heure caractériser l’esprit est ce portrait de femme, par M. Haffner, — noyé dans le gris et resplendissant de mystère, — qui, au Salon dernier, avait fait concevoir de si hautes espérances à tous les connaisseurs. Mais M. Haffner n’était pas encore un peintre de genre, cherchant à réunir et à fondre Diaz, Decamps et Troyon.

On dirait que Mme E. Gautier cherche à amollir un peu sa manière. Elle a tort.

MM. Tissier et J. Guignet ont conservé leur touche et leur couleur sûres et solides. En général, leurs portraits ont cela d’excellent qu’ils plaisent surtout par l’aspect, qui est la première impression et la plus importante.

M. Victor Robert, l’auteur d’une immense allégorie de l’Europe, est certainement un bon peintre, doué d’une main ferme ; mais l’artiste qui fait le portrait d’un homme célèbre ne doit pas se contenter d’une pâte heureuse et superficielle ; car il fait aussi le por-