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bloc de plomb ; la force de sa chute est ég-ale au produit de la masse multiplié par le carré de la vitesse ; c’est une des lois les plus simples de la mécanique ; il aurait dû se briser en mille morceaux  ; il en fut quitte pour se concasser les deux jambes.

Le comte de Lauraguais fut moins imprudent ; il eut aussi la manie des expériences, mais il se borna à chercher les moyens d’opérer la combustion du diamant. Pair de France, il se fit recevoir avocat à Londres. Frondeur impitoyable, il se fit exiler et emprisonner maintes fois ; il s’amusa, dans un mémoire lu à l’Académie sur l’inoculation, à cribler d’épigrammes la faculté et la magistrature ; il en fut puni par un séjour à la Bastille. Il soutint un procès contre son secrétaire qui l’accusait d’avoir porté le trouble dans son ménag^e, et il se défendit par un factum,sous ce titre bizarre : Mémoire pour moi, par moi. Quoi qu’il pût faire, il n’atteignit pas à la célébrité du marquis de Brunoy.

Possesseur d’une fortune énorme, celui-ci la dépensa dans les extravagances les plus étranges ; il donnait aux paysans de ses terres les repas les plus splendides. La femme d’un bourrelier mourut ; il lui fit faire un enterrement tel qu’une princesse en aurait été vaine : 5o.ooo livres y passèrent. Il épousa Mil* d’Escars, l’un des plus beaux noms de la noblesse française ; il donna à sa fiancée pour 700.000 livres de bijoux, de parures, et, le jour des noces, il disparut, s’enfuit dans un de ses châteaux. 11 ne voulut jamais revoir sa femme. L’église de Brunoy tombait en ruines, le marquis la rebâtit, la dore, l’embellit, la fait plus riche que la