Page:Baudelaire - Œuvres posthumes 1908.djvu/245

Cette page n’a pas encore été corrigée

qui affirmeat évidemment la permanence des per- sonnalités.

Edy^ar Poe était très fier de ce livre, qui n’eut pas, ce qui est tout naturel, le succès de ses con- tes. II faut le lire avec précaution et faire la véri- fication de ses étrang-es idées par la juxtaposition des systèmes analojjues et contraires.

IV

J’avais un ami qui était aussi un métaphysicien à sa manière, enra^çé et absolu, avec des airs de Saint-Just. Il me disait souvent, en prenant un exemple dans le monde, et en me regardant moi- même delravers : « Toul mystiqueaun vicecaché. » Et je continuais sa pensée en moi-même : donc il faut le détruire. Mais je riais, parce que je ne le comprenais pas. Un jour, comme je causais avec un libraire bien connu et bien achalandé, dont la spécialité est de servir les passions de toute la bande mystique et des courtisans obscurs des scien- ces occultes, et comme je lui demandais des rensei- gnements sur ses clients, il me dit : « Ilappelez- vous que tout mystique a un vice caché, souvent très matériel ; celui-ci l’ivrognerie, celui-là la goin- frerie, un autre la paillardise ; l’un sera très avare, l’autre très cruel, etc.. »

Mon Dieu ! me dis-je, quelle est donc cette loi fatale qui nous enchaîne, nous domine, et se venge de la violation de son insupportable despotisme [)ar la dégradation et l’amoindrissement de notre être moral ? Les illuminés ont été les plus grands des hommes. Pourquoi faut-il qu’ils soient châtiés de leur grandeur ? Leur ambition n’élait-elle pas