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cela, tourna et tomba à moitié, et nous montra tout à fait sa fîg-ure. Non, jamais il n’y eut d’objet aussi ter- rible ! Les yeux n’y étaient plus, et toutes les chairs de la bouche rongées, les dents étaient entièrement à nu. Tel était donc ce sourire qui avait encouragé notre espé- rance ! Tel était..., mais je m’arrête. Le brick, comme je l’ai dit, passa à notre arrière, et continua sa roule en tombant sous le vent. Avec lui et son terrible équi- page s’évanouirent lentement toutes nos heureuses visions de joie et de délivrance.


Eurêka était sans doute le livre chéri et long- temps rêvé d’Edgar Poe. Je ne puis pas en rendre compte ici d’une manière précise. C’est un livre qui demande un article particulier. Quiconque a lu la Révélation magnétique connaît les tendances métaphysiques de notre auteur. Eurêka prétend développer le procédé, et démontrer la loi suivant laquelle l’univers a revêtu sa forme actuelle visible et trouvé sa présente organisation, et aussi com- ment cette même loi, qui fut l’origine de la création, sera le moyen de sa destruction et de l’absorption définitive du monde. On comprendra facilement pourquoi je neveux pas m’engager à la légère dans la discussion d’unesi ambitieusetentative. Je crain- drais de m’égarer et de calomnier un auteur pour lequel j’ai le plus profond respect. On a déjà accusé Edgar Poe d’être un panthéiste, et, quoique je sois forcé d’avouer que les apparences induisent à le croire tel, je puis affirmer que, comme bien d’autres grands hommes épris de la logique, il se contredit quelquefois fortement, ce qui fait son éloge ; ainsi, son panthéisme est fort contrarié par ses idées sur la hiérarchie des êtres, et beaucoup de passages