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alcool maudit effleurait ses lèvres depuis plusieurs mois ; mais cela suffit pour réveiller le Diable qui dormait en lui. Une journée de débauche amena une nouvelle attaque du deliriumtremens, sa. vieille connaissance. Le matin, les hommes de police le ramassèrent par terre, dans un état de stupeur. Comme il était sans argent, sans amis et sans domi- cile, ils le portèrent à l’hôpital, et c’est dans un de ses lits que mourut l’auteur du Chat noir et d’ Eu- rêka, le 7 Octobre 1849, à l’âg-e de 87 ans.

Edgar Poe ne laissait aucun parent, excepté une sœur qui demeure à Richmond. Sa femme était morte quelque temps avant lui, et ils n’avaient pas d’enfants. C’était une demoiselle Clemm, et elle était un peu cousine de son mari. Sa mère était profondément attachée à Poe. Elle l’accompagna à travers toutes ses misères, et elle fut efl^royablement frappée par sa fin prématurée. Le lien qui unissait leurs âmes ne fut point relâché par la mort de la fille. Un si grand dévouement, une affection si noble, si inébranlable, fait le plus grand honneur à Edgar Poe. Certes, celui qui a su inspirer une si immense amitié avait des vertus, et sa personne spirituelle devait être bien séduisante.

M. Willis a publié une petite notice sur Poe ; j’en tire le morceau suivant :

La première connaissance que nous eûmes de la re- traite de M. Poe dans cette ville nous vint d’un appel qui nous fut fait par une dame qui se présenta à nous comme la mère de sa femme. Elle était ù la recherche d’un emploi pour lui. Elle motiva sa conduite en nous expli- quant qu’il était malade, que sa fille était tout à fait infirme, et que leur situation était telle qu’elle avait cru devoir prendre sur elle-même de faire cette démarche.