Page:Baudelaire - Œuvres posthumes 1908.djvu/126

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de l’homme, d’où naît son horreur de la solitude. — Il veut être deux. L’homme de génie veut être un, donc solitaire. La gloire, c’est rester un, et se prostituer d’une manière particulière.

C’est cette horreur de la solitude, le besoin d’oublier son moi dans la chair extérieure, que l’homme appelle noblement besoin d’aimer.

Deux belles religions, immortelles sur les murs, éternelles obsessions du peuple : le phallus antique et « Vive Barbès ! » ou « A bas Philippe ! » ou « Vive la République ! ».

*

Etudier dans tous ses modes, dans les œuvres de la nature et dans les œuvres de l’homme, l’universelle et éternelle loi de la gradation, des peu à peu, du petit à petit, avec les forces progressivement croissantes, comme les intérêts composés, en matière de finances.

Il en est de même dans l’habileté artistique et littéraire ; il en est de même dans le trésor variable de la volonté.

*

La cohue des petits littérateurs, qu’on voit aux enterrements, distribuant des poignées de mains et se recommandant à la mémoire du faiseur de courriers. De l’enterrement des hommes célèbres.

Molière. — Mon opinion sur Tartuffe est que ce n’est pas une comédie, mais un pamphlet. Un athée, s’il est simplement un homme bien élevé, pensera, à propos de cette pièce, qu’il ne faut jamais livrer certaines questions graves à la canaille.