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L’invocation à Dieu, ou spiritualité, est un désir de monter en grade ; celle de Satan, ou animalité, est une joie de descendre. C’est à cette dernière que doivent être rapportées les amours pour les femmes et les conversations intimes avec les animaux, chiens, chats, etc...

Les joies qui dérivent de ces deux amours sont adaptées à la nature de ces deux amours.

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Ivresse d’humanité ; grand tableau à faire, dans le sens de la charité, dans le sens du libertinage, dans le sens littéraire, ou du comédien.

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La question (torture) est, comme art de découvrir la vérité, une niaiserie barbare ; c’est l’application d’un moyen matériel à un but spirituel.

La peine de mort est le résultat d’une idée mystique, totalement incomprise aujourd’hui. La peine de mort n’a pas pour but de sauver la société, matériellement du moins. Elle a pour but de sauver (spirituellement) la société et le coupable. Pour que le sacrifice soit parfait, il faut qu’il y ait assentiment et joie, de la part de la victime. Donner du chloroforme à un condamné à mort serait une impiété, car ce serait lui enlever la conscience de sa grandeur comme victime et lui supprimer les chances de gagner le paradis[1].

  1. « Dandies.
    « L’envers de Claude Gueux. Théorie du sacrifice. Légitimation de la peine de mort. Le sacrifice n’est complet que par le sponte sua de la victime.
    « Un condamné à mort, raté par le bourreau, délivré par le peuple, retournerait au bourreau. Nouvelle justification de la peine de mort. » (Collection Crépet.)