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donnés, opere par le moyen de son savoir et des grandes ma[118]chines sur lesquelles il l’exerce, des effets prodigieusement plus considérables que n’en opéreroient quelques dixaines, ou même quelques centaines d’hommes de plus, mais isolés, mais dénués de science et de machines.

On peut observer sous ce point de vue tous les travaux qui s’exercent dans les sociétés policées, c’est une des considérations les plus utiles et les plus importantes à proposer.

Appliquons maintenant cette idée si distincte aux opérations de l’art productif, nous verrons que l’agriculture proprement dite, le pâturage, la pêche, la métallurgie, nous offriront des exploitations de diverses especes, dont les unes se font en grand les autres en petit.

Les unes en grand, c’est à dire, par un seul chef aidé d’un très petit nombre d’hommes subordonnés, mais opérant beaucoup par le moyen de son savoir, de ses grands et forts instruments. [119] Les autres en petit, c’est-à-dire, par des hommes isolés, dénués de science, de grands et forts instruments, qui travaillent beaucoup et en très grand nombre, pour opérer un effet moindre, et dont le succès est plus problêmatique.

Prenons pour exemple la plus générale et la plus nécessaire des cultures, celle des grains qui fournit la portion principale des subsistances, soit immédiatement aux hommes eux-mêmes, soit aux animaux divers qui deviennent ensuite leur pâture.

La différence est déja très grande, sans doute, entre un sauvage isolé de l’Amérique septentrionale, qui gratte une terre sans préparation ou sans avances foncieres, avec l’instrument à peine ébauché, d’une pelle de bois durci au feu, et un riche Fermier de Flandres ou d’Angleterre, qui fait rouler douze grandes charrues de labourage.

Ce chef d’exploitation rurale avec [120] quarante ou cinquante hommes subordonnés seulement ; mais avec son savoir et ses grandes machines mues par une soixantaine de chevaux, entretient avec facilité une culture si prospere, qu’il en résulte des récoltes immenses, et telles que trois cents hommes isolés auroient peine à se les procurer.

L’ensemble des opérations, la supériorité de l’art qui les dirige, la perfection des machines, le bon emploi des animaux et de leurs forces, caractérisent ces grandes exploitations ; leur objet est d’épargner la terre et les hommes.