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encore la réalité toujours subsistante de ces mêmes travaux, et la preuve très incontestable de leur efficacité. Outre sa muraille, son grand canal de 1200 lieues, ses digues, ses ponts, ses grands chemins, objets qu’on ne peut pas raisonnablement regarder comme des fables ; cent et cent témoins oculaires attestent qu’en plusieurs provinces les plus hautes montagnes y sont arrosées au gré du cultivateur, par les eaux mêmes des rivieres ou des canaux qui passent au bas, et qu’on éleve par des machines jusqu’au sommet.

Ensorte que dans ces provinces, le simple laboureur a pour féconder son [76] champ, des machines telles qu’on a regardé comme un très grand luxe dans un des plus puissants et des plus fastueux souverains de ce siécle, d’en avoir fait construire une seule à-peu-près de ce genre pour le service et la décoration d’un des plus beaux palais de l’Europe.

L’idée de cette administration, de la grandeur et de l’utilité des travaux publics qu’elle ordonne, qu’elle perfectionne de plus en plus, est une idée fondamentale qu’il faut imprimer fortement dans la tête de tous ceux qui veulent s’occuper de philosophie économique ; c’est sur-tout dans ces quatre nations vraiement illustres qu’on la trouve florissante, chez les Caldéens, les Égyptiens, les Péruviens et les Chinois. Les peuples plus modernes, tels que les Grecs et les Romains, que le pédantisme des colléges nous rend si vénérables, ne nous en offrent que de très foibles traces, et cela dans le tems très court [77] de leur plus grande prospérité, qui fut celui de leur respect pour la justice, et du zèle pour la culture de leurs propriétés foncieres.

Les nations plus que semi-barbares de notre Europe moderne, sont encore dans un éloignement prodigieux du point de perfection de ces quatre grands peuples. L’idée d’une administration vraiement royale, de la majesté de ses œuvres et de leur influence nécessaire sur le bien-être de l’humanité, ne vient que d’éclore parmi nous.

Il n’en est pas moins vrai qu’en jettant les yeux sur les États qui nous environnent, on y trouvera la prospérité des sujets dans une proportion exacte avec la sagesse de l’administration, avec la grandeur des travaux par elle consacrés à ce grand et unique objet de vivifier son territoire.

On verra, par exemple, que la Hollande est de toute l’Europe le pays le [78] plus riche en production territoriale, et les Hollandois