Elle est mal administrée, quand le magistrat par sa faute ou par celle de tout autre, attribue des propriétés à ceux qui ne les ont pas acquises par le titre naturel, et gêne les libertés.
2o la justice criminelle punit les délits commis, pour empêcher par la crainte des châtiments, ceux qui pourroient se commettre sans cette crainte. L’idée puérile de la vengeance ne doit jamais entrer dans le systême des loix pénales, autrement elle les rendroit déreglées, atroces, et par-là même inutiles : c’est ce que l’expérience a prouvé désormais aux peuples de l’Europe.
Un Empire qui servira sans doute de modele en cette partie très importante, mais non dans plusieurs autres, a pris pour base de sa justice criminelle, que le sang des hommes doit toujours être respecté par les hommes dans tous les [63] cas. On a lieu d’espérer que ce principe de la loi naturelle deviendra la regle générale des nations qui l’ont tant oublié.
Vous voulez empêcher les meurtres, en inspirer de l’horreur ? Et vous en faites commettre de sang froid par milliers pour le moindre sujet, quelle inconséquence ! C’est ce qu’on auroit pû dire aux législateurs sanguinaires, anciens et modernes. Vous inspireriez bien mieux cette horreur, en regardant vous-même comme sacrée, la vie même des plus grands criminels que vous puniriez du délit commis, et que vous empêcheriez d’en commettre de nouveaux.
« Mais, dit-on, la peine de mort en impose, elle contient ; les autres châtiments ne répriment pas » ; double erreur. La peine de mort rendue commune n’empêche rien, témoins tous les peuples et tous les siécles où l’on a prodigué la vie des criminels. Les peines [64] moins atroces répriment bien mieux quand elles sont inévitables par le bon ordre de l’état et par la juste sévérité des magistrats.
Résumons donc. Que résulte-t-il dans un État policé de la justice civile et criminelle bien administrée ? Il en résulte : « que quiconque fait, peut et veut, accomplir un travail quelconque de l’un des trois arts, n’en est empêché par qui que ce soit ; il en résulte que quiconque s’est acquis une propriété par son travail, peut en jouir par lui ou par ses représentants à son choix, sans en être empêché par qui que ce soit. Liberté d’acquérir, liberté de jouir. »
Mais que résulte-t-il de ces libertés ? Il en résulte le travail, qui opere le maintien, la perfection progressive des trois arts caracté-