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fantôme, qu’une apparence ; et qu’ainsi il ne peut lui apporter rien de réel. C’est ce qui revêt d’agrément dans les arts les objets qui étoient désagréables dans la nature. Dans la nature ils nous faisoient craindre notre destruction, ils nous causoient une émotion accompagnée de la vue d’un danger réel : & comme l’émotion nous plaît par elle-même, et que la réalité du danger nous déplaît, il s’agissoit de séparer ces deux parties de la même impression. C’est à quoi l’art a réussi : en nous présentant l’objet qui nous effraye, et en se laissant voir en même-tems lui-même, pour nous rassurer & nous donner, par ce moyen, le plaisir de l’émotion, sans aucun mêlange desagréable. Et s’il arrive par un heureux effort de l’art, qu’il soit pris un moment pour la nature elle-même, qu’il peigne par exemple un serpent, assez bien pour nous causer