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coudre à la piece de nouveaux sentimens qui ressemblent aux premiers. Que la nature allume le feu ; il faut au moins que l’art le nourrisse et l’entretienne. Ainsi l’exemple des prophètes, qui chantoient sans imiter, ne peut tirer à conséquence contre les poëtes imitateurs. D’ailleurs, pourquoi les cantiques sacrés nous paroissent-ils, à nous, si beaux ? N’est-ce point parce que nous y trouvons parfaitement exprimés les sentimens qu’il nous semble que nous aurions éprouvés dans la même situation où étoient les prophètes ? & si ces sentimens n’étoient que vrais, & non pas vraisemblables, nous devrions les respecter ; mais ils ne pourroient nous faire l’impression du plaisir. De sorte que, pour plaire aux hommes, il faut, lors même qu’on n’imite point, faire comme si l’on imitoit, & donner à la vérité les traits de la vraisemblance.