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ANNA.

Nous voulions lui écrire, Rozenne et moi, pour avoir deux mètres de fumier, parce que, en somme, le fumier de l’âne, maintenant…

(À ce moment, une vieille femme entre en cape de deuil, c’est la vieille nourrice de Julien.)
JULIEN.

Te voilà, Margareck !… C’est moi…

(La vieille ne dit rien ; elle s’avance.)
ROZENNE.

Ça lui fait de l’émotion… elle pleure.

JULIEN, (va à elle.)

On s’embrasse ? (La vieille l’étreint.) Alors, tu ne vois plus, ma pauvre Margareck ? (La vieille secoue la tête.) Pauvre ! Moi aussi j’ai une grande émotion de te revoir !… Demain, j’irai causer avec toi, parce qu’aujourd’hui nous ne sommes en état ni l’un ni l’autre, n’est-ce pas ?… Et puis, tu devrais être couchée à cette heure-ci. (Bas à Anna.) Que fait-elle toute la journée ?

ANNA.

Rien… Elle reste seule sur le seuil de sa maison. Quelquefois, je vous dis, elle va tout de même aux champs… Quand on lui demande si elle s’ennuie, elle répond : « Non, je réfléchis !… » Elle revoit sans doute dans sa tête… Elle est gênée… Je crois qu’elle voudrait s’en aller.

JULIEN.

Eh bien, va, Margareck… Demain, je m’assoirai devant ta maison. Nous causerons du passé…