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Tous les matins je me réveille étonné de ne pas être beaucoup plus vieux que la veille.

LIANE.

On l’est d’un jour. C’est suffisant. Mais, moi, je m’en fiche !…

LORÉDAN.

Liane !… il n’y a qu’un seul drame dans la vie qui compte, celui du temps.

LIANE.

C’est pourquoi vous vous teignez et pourquoi vous vous mettez du bleu aux yeux. Vous en avez trop mis ce soir. Ça coule… Essuyez-vous, Lorédan.

(Elle lui tend son mouchoir.)
LORÉDAN, (se regardant dans la glace.)

Il faut bien nous truquer ma chère.

LIANE.

Parlez pour vous, vieille vipère chérie !…

LORÉDAN.

Au fait, une femme truque toute la vie.

LIANE.

Petite jalouse, va !

LORÉDAN.

Lianon… je suis l’homme terrible à qui vous ne pouvez pas cacher votre âge. Je n’en abuserai pas, rassurez-vous. Il n’est pas encore assez considérable. J’attends. Pour le moment, vous êtes une femme de trente-neuf ans quatre-vingt-quinze, pour ne pas dire…

LIANE, (l’interrompant.)

Oui, gale ! Vous avez, pour vous rappeler mon