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taré ! Quand je sens en moi quelque chose de propre, de bien…

RANTZ.

De propre, en effet !

MAURICE.

Oui, de bien… ce qui m’agite depuis huit jours, une grande douleur, des impulsions, des tendresses de toute espèce, ce qui bouillonne là, en moi, eh bien, je n’ai pas la possibilité de le sortir !… Alors, comme il faut bien agir tout de même, se porter au secours de ceux qu’on aime, je me sers des armes que la vie me donne… Bast ! faut pas être fier !… Et tant pis si la cause est bonne ! Parce qu’il me semble tout de même qu’il y a une chose qui m’absout, c’est que ce n’est pas pour moi, ce que je fais là… Vous comprenez ?… Pour moi, je n’oserais pas ! Je sens qu’il y a là des élans qui veulent sortir, qui me poussent… Alors, je vais, je vais… j’avance, je fonce dans le tas… je saisis l’occasion qui passe… je voudrais faire parler ma voix, me faire comprendre… je voudrais…

RANTZ.

Et pour cela vous criez, au besoin vous hurlez, vous forcez les portes et les meubles… Vous tirez de vous la bassesse innée de l’homme qui se dégrade !… Allons donc ! Bas le masque ! Si vous étiez sincère, et si vous aviez une once d’ardeur morale, vos actes seraient plus désespérés encore, peut-être, mais ils seraient plus nobles et plus crânes… À toutes les faiblesses il y a des excuses, il n’y en a pas à l’infamie !…

MAURICE.

Infamie ! Quel beau mot ! Ah !

(À cet instant, la porte s’est ouverte, le petit Raoul, avec son cartable sur le dos, vient d’entrer.)