Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 7, 1922.djvu/52

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’elle aura contenu de vérité que cette œuvre est appelée à subsister dans l’avenir. »

Précisément, à l’heure où j’écris ces lignes, la Marche Nuptiale, à son tour, reçoit à la Comédie-Française, de la part du public et des critiques mêmes qui, jadis, l’ont pourfendue, un accueil presque sans restriction ; bref, une consécration telle qu’il m’est permis de me reporter au jour de sa création où la pièce fut tellement discutée, et si médiocrement goûtée. Alors comme aujourd’hui, moins âpres mais tout aussi flagrantes, c’étaient les éternelles rengaines : « détraquement, névrose, malsain, etc… » Et il n’y a que huit ans de cela ! Le temps marche vite et l’évolution se fait rapide. Ce qui était impur hier est pur aujourd’hui… Ainsi va le monde, et c’est très beau, très réconfortant et très sain !

Mes prophéties ne sont donc pas téméraires, et pas une preuve, en tout cas, ne m’a été donnée que je me fusse trompé. Il faut par conséquent excuser ma présomption. La Cour d’appel fait autorité. Il reste bien une autre et suprême juridiction, mais celle-là, il est trop hasardeux d’y prétendre : elle ne dépend que de la postérité. Contentons-nous de la leçon du présent.

Pour moi, je continuerai, dans ma bonne foi et dans une solitude résolue, de donner les ouvrages dont j’ai le dessein ou l’ambition… Je crois qu’il n’est pas de plus grand honneur que celui de recevoir l’éloge de ses pairs, lorsqu’il se présente ; qu’il faut être fier de recueillir l’assentiment de ceux que l’on admire, l’assentiment aussi de la grande foule ; mais si, par hasard, ils vous font défaut, l’un ou l’autre, ou tous deux, il convient de ne s’en inquiéter guère et de continuer son chemin, insensible au concert d’impréca-