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censeurs et qui corrompt le théâtre. C’est la pornographie du vaudeville national, l’autre sournoise pornographie de la pièce légère, qui dissimule sous des dehors de convention le vice le plus vulgaire, c’est le mélodrame pleurnicheur, la sucrerie élégiaque et bourgeoise, le faux optimisme béotien, signe suprême de décadence.

Les voilà, avec leurs complices éhontés de la presse, les officines de salles de rédaction, les voilà, les corrupteurs de la bourgeoisie française et les exploiteurs du mauvais goût public…

Ce sont généralement de froids méthodistes, des spéculateurs sans sincérité qui habillent la routine au goût du jour, — avec la complicité bienveillante de toute la corporation, auteurs et journalistes.

Mais l’art veille, — et la France a toujours été la première à se porter aux avant-postes.

Ah ! la vérité… Sais-tu, jeune homme, — j’y songe parfois — ce qui m’en a donné le goût, sans pour cela m’en avoir donné le pouvoir, hélas ! je le reconnais ? C’est mon éducation de peintre. À contempler, cinq ans, la nature au milieu de ces gens sains et frustres que sont, pour la plupart, les peintres, dans leur adolescence, j’ai acquis la vénération des formes vraies, de la ligne d’expression. La pureté du nu m’a donné le goût de la noblesse naturelle de l’homme, l’horreur de la pornographie, de l’hypocrisie, de l’équivoque, du sournois en art… Le nu a même eu, par son enseignement hautain, des retentissements plus profonds en moi… Il m’a justement donné la probité intellectuelle, et cette religion de la nature que depuis je porte en moi… Ce fut durant les années d’atelier que je compris la