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reur que l’on froisse les fleurs. (Brusquement.) Je suis très changée ?

LIGNIÈRES.

Positivement oui.

THYRA, (avec angoisse.)

Maigrie, enlaidie, n’est-ce pas ?

LIGNIÈRES.

C’est autre chose ! Une autre femme… Votre rire est différent… âcre… Votre bouche a des expressions nouvelles… tout !… les yeux, le mouvement des doigts !… vos cheveux noirs devenus vénitiens… Oh ! je vous trouve très différente, évidemment.

THYRA, (comme avec orgueil.)

Je suis une souffrante passionnée.

LIGNIÈRES.

Prenez garde, un tel excès de vie épuise vite les âmes pâmées.

THYRA.

Au contraire, je crois à l’instinct merveilleux et fort des malades qui suscite la vie !…

LIGNIÈRES.

Ah ! Thyra ! je commence enfin à me représenter le couple que vous formez ! Il n’y a pas que votre amie Allégra qui soit trop parfumée et qui dégage d’entêtantes odeurs. Je devine que, dans cette vie ardente, vous n’attachez d’importance qu’au plaisir, et vous ne devez guère vous inquiéter, n’est-ce pas, que du pincement des moustiques !… Je vous ai quittée petite enfant agitée, troublée… Je vous retrouve vagabonde de luxe, compagne d’un Strozzi ou d’un Médicis… car il est vraiment de la lignée qui