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gréables à la fille. Je vous jure que je ne pouvais m’apercevoir de rien de positif.

LE DUC.

De positif est joli !

LA DUCHESSE.

Je remarquais bien quelque mauvaise humeur entre eux, de petites privautés… Oh ! une ou deux fois un soupçon m’a bien passé par l’esprit à cause d’une raquette agitée avec trop de fureur… en promenade aussi, peut-être, une manière d’être trop près l’un de l’autre… leurs bicyclettes qui se cherchaient sur la route… Mais on ne pense à tout cela qu’après !… Que voulez-vous que je vous dise, je suis désemparée, je suis désemparée !

(Elle incline vers le sol une figure désolée sur laquelle tremble, par secousses, l’or trop vif de la chevelure.)
LE DUC, (résolument.)

Enfin, une solution s’impose. Nous vous avons fait appeler pour que vous nous donniez votre avis ; il faut sauver mon enfant de l’emprise de cet homme, la sauver à tout prix ! Il est indispensable de l’éloigner d’ici au plus vite, qu’elle ne puisse le revoir ; c’est le seul remède que nous ayons actuellement à notre disposition. Ni réparation, ni châtiment ; il n’y en a pas ! Sur un homme de cet âge et marié, on ne peut exercer que des représailles. Et quel châtiment souhaiter quand il n’y a pas de pénalité ? La séduction masculine est impunie ! Monsieur l’abbé, puis-je envoyer ma fille à l’étranger, la confier à une autorité ? Peut-on lui trouver une surveillante intelligente ? J’ai une confiance aveugle dans vos conseils.