Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 6, 1922.djvu/128

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pas, laissez-moi simplement constater qu’avec votre morale à vous… ce serait rapidement l’anarchie… Ces idées-là, c’est la fin de la société.

ARMAURY.

C’est le commencement de l’amour !…

L’ABBÉ.

Il faut vivre avec son époque et son temps, Monsieur !… Nous ne sommes pas les gens de l’avenir, nous sommes les gens du présent, et nous devons nous soumettre à ses moeurs, à ses usages et à son code… (Souriant.) mon cher bâtonnier…

ARMAURY.

J’apprécie l’allusion ; mais, ce qu’il y a d’extraordinaire, c’est que vous parlez de la société comme un de ses représentants ! Allons donc, Monsieur l’abbé, vous êtes plus que moi en marge de la société, vous qui avez fui le devoir social. Si j’ai pleinement suivi la loi de l’amour, vous, vous l’avez reniée et, pour la société, cela revient au même, cela est pire !

L’ABBÉ.

Vous vous trompez. Mon célibat n’est pas en marge de la société. Il ne nuit au moins à personne.

ARMAURY.

Allons ! Allons ! vous êtes bel et bien un individualiste acharné, mon cher abbé ! Mais, si champion inattendu que vous vous fassiez de la vie moderne, vous n’allez pas jusqu’à prétendre sérieusement, je l’espère bien, que la société a harmonisé les choses de l’amour et que tout est bien dans le meilleur des mondes ?… Voyez mon cas de séducteur, justement. On m’interdit de