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Mais ce à quoi je suis d’avance résigné depuis le premier jour où un baiser de Rosette m’est tombé sur les lèvres… J’attendrai encore — oh ! le temps d’être bien sûr que c’est définitif, qu’elle ne se trompe pas — on ne sait jamais, n’est-ce pas ? Oh ! alors, je ne chercherai pas à entrer en ligne de compte. J’irai, un jour, pour mes affaires, du côté de Lyon… et voilà. Elle n’entendra plus parler de moi… comme par hasard. Ah ! mais, par exemple, je ne m’en irai que sûr et certain que la place devient vilaine et vraiment impossible pour un cœur comme le mien… Seulement je ne lui dirai rien, tu sais ! À quoi bon la troubler ?… Elle est si bonne, si gentille et si délicate !… Si tu la connaissais, tu verrais… On ne peut pas savoir. On la croit frivole… du tout. Ce n’est pas sa faute… pauvre chatte !… Elle a des mouvements spontanés, des trouvailles si adorables… Ah ! quel malheur tout de même que je n’aie pas été son type !

BOUDIER.

Mais qu’en savez-vous tous les deux, à la fin ?… toi qui n’as même pas tenté l’assaut de son cœur… et elle qui a consenti à être ta maîtresse, après tout !

POLICHE.

Justement ! Crois-en sur parole l’amant du jour et des nuits… J’ai eu de l’amour par surcroît. Que veux-tu, on ne choisit pas l’être qu’on aime… il est des bouches qui, en prononçant les mêmes mots d’amour, font le bonheur de l’une et l’ennui de l’autre… Mais j’ai été payé — ne me plains pas —