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à sa fille l’argent nécessaire pour qu’elle ne meure pas de faim, avec ce traîne-misère…

GRÂCE, (avec hauteur.)

Assez… Pas un mot de plus sur ce sujet. J’attends la conséquence de mon acte, avec fierté et comme un honneur. Jamais, tu entends, maman, jamais je n’accepterai un sou de vous. Tiens-le-toi pour dit. J’aimerais mieux mourir de faim. Mon bonheur, je le gagne déjà, comme je l’entends. Le coup d’audace que tu as tenté en amenant les deux petites avec toi, — car les mères ont parfois des audaces singulières ! — tout ce déplacement, ne pouvaient aboutir… Restons-en là. Gardons le souvenir du passé, chacun de notre côté, que veux-tu ?… Et puis, voilà tout, ma pauvre maman !…

MADAME DE PLESSANS.

Le bandit, il me l’a ensorcelée, le bandit !

GRÂCE, (avec lassitude.)

Soyons sérieux, maman…

MADAME DE PLESSANS.

Oh ! je ne sais plus ce que je dis, en effet !… Je ne sais plus où je suis…

GRÂCE, (tristement.)

Mais si, maman. Tu souffres, au fond, je le sens bien… Tu es de ces gens qui ne savent pas exprimer leur douleur… C’est le cas de tous les parents…