d’enfant, vous avez compris tout de suite ! (Il roule machinalement une cigarette qu’il ne fume pas et tourne sur le tabouret de piano.) Il y a un instant, je ne vous connaissais
pas… je serai franc, vous ne m’intéressiez
même pas du tout… Je vous ai toujours considérée
comme une enfant insupportable, et d’ailleurs parfaitement
inutile !… Seulement, j’avoue, mon pauvre
gosse, que depuis une heure je commence à comprendre
(on est long à comprendre !) votre sort à
venir… et ce qui vous attend… Qui sait, dans tout
cela, si ce nest pas vous la plus intéressante, après
tout !… Quand, dans la vie, il y a quelqu’un de trop, la
nature s’arrange toujours pour l’éliminer, en lui flanquant
tous les torts sur le dos !… C’est vous qui vous
êtes débattue peut-être le plus généreusement, sans
calcul, commettant toutes les gaffes, sans rien savoir…
(Jeannine fond en sanglots.) Ne vous désolez pas !… Ah !
ce n’est pas gai, fichtre, mais on n’en meurt pas…
Il y en a d’autres que vous sur la terre qui ont endossé,
avec plus de rancœur, allez, et à un âge où on
ne se console plus, hélas ! cette sorte d’emploi… Vous
avez quel âge ? dix-sept ans… dix-huit ans ? (Jeannine fait signe de la tête que non.) Dix-sept ?…
(Jeannine fait signe de la tête que oui.) Pfff ! Remerciez le ciel de vous
avoir envoyé la précocité de la douleur. Vous en serez
débarrassée plus tôt !…
Oh ! ça, monsieur, jamais ! jamais !…
Pauvre petit ! comme vous avez bien dit ça !… Votre angoisse passera tout de même plus vite que vous ne l’espérez !… Mais qu’on vous a mal éduquée !… L’une a vu seulement en vous une malade (l’éternelle rengaine !) l’autre, Georges… il ne connaît rien aux femmes !… C’est même sa grande force sur elles, — le gredin ! (Avec un soupir.) Enfin !… Malgré quoi, vous