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GEORGES, la suivant.

Elle est malade ?

ISABELLE.

Seulement un peu énervée… Jeannine ? Où donc a-t-elle passé ? (Allant au hall.) Tu es là ? (Georges l’embrasse sur la nuque.) Taisez-vous ! Vous avez failli me faire tout renverser.

GEORGES.

Posez donc ce meuble, c’est gênant.

ISABELLE.

Retournez. Nous sommes ridicules. Depuis une heure on doit prendre nos petites absences pour des allusions d’impatience. C’est grotesque. Nous avons l’air de le faire exprès.

GEORGES.

Ça vous ennuierait donc tant d’avoir l’air de le faire exprès ? Tu m’aimes ?

ISABELLE.

Je t’aime.

GEORGES.

Oh, ce premier « tu » ! Ce n’est pas mal pour une première fois, mais il y a mieux. On dit « tu », très fort. Ça doit durcir les lèvres. (Ils s’embrassent.) J’ai été irréprochable, tout à l’heure, dites ?

ISABELLE.

Comme toujours.

GEORGES, avec un rire malin.

C’est égal, je ne suis pas fâché de cette conversation ! Je n’avais pas besoin d’être renseigné certes, mais on apprend toujours… Ah ! vous êtes une femme à poigne et d’une beauté… un peu froide… mais si supérieure !… Enfin !… Seulement, moi, vrai, j’ai honte avec mon désir vulgaire… J’ai peur de vous dégoûter…

ISABELLE.

Non, Georges, je vous estime et vous aime ; si je mets le devoir de la vie plus haut que tout, mon affection pour vous n’en est pas diminuée… Allez, n’ayez