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ISABELLE.

Mais, Pierre, votre place ne sera pas changée ici… Gardez-la.

PIERRE.

J’ai attendu, vous le voyez jusqu’au dernier jour pour perdre tout espoir. C’est du fond du cœur, ma grande et forte amie, que je vous dis adieu ! Oh ! la mélancolie que j’y mets n’est que tout égoïste… c’est un vieux pleur de vieux garçon qui grogne contre des habitudes dérangées… oh ! sans quoi ! vous m’avez donné l’exemple de la sagesse… Vous êtes une femme parfaite et sans faiblesse. Un beau jour, vous avez choisi entre vos intimes l’homme qui paraissait le plus propre à vous rendre heureuse et votre choix fut longuement médité ! Vous avez exclu celui qui vous aimait « le trop »… Vous passerez ainsi, bien calme, de l’amitié à l’amour. Et c’est pourquoi je vous quitte sans autre regret que celui de quelques habitudes chiffonnées.

ISABELLE.

Ah ! Pierre ! Pierre ! vous ne serez jamais sage !

PIERRE.

Tout le monde ne le peut pas… Enfin vous, vous serez heureuse… Tout compte fait, votre vie promet… Tiendra-t-elle ?

ISABELLE.

J’espère.

(Leurs yeux se fixent dans la lumière brusque d’une lampe.)
PIERRE.

Vous avez raison, il fallait garder vos yeux des lumières trop vives ; ils étaient peut-être bien faibles pour les supporter.

ISABELLE.

Que voulez-vous ! Je me résignerai à l’abat-jour.

PIERRE, la regardant.

Oui, votre visage n’en sera pas moins joliment éclairé.