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ANDRÉ, parlant sur elle.

… « Et voilà, maintenant qu’il s’agit de moi, ce n’est pas la même chose !… »

GENEVIÈVE.

André !… Puisque…

ANDRÉ, criant à tue-tête.

Oui, tu avais le droit, tu avais le droit commun !… Ce n’est pas la trahison qui m’écœure et me révolte… Tu avais le droit !… Ça ? mais je m’en fiche, c’est bien simple… je m’en fiche !… tu dois bien le voir à mon calme !… (Il la repousse avec fureur. Le tumulte de leurs deux voix mêlées s’apaise brusquement. André continue seul. Il arpente la pièce en gesticulant.) Non, ce qui m’écœure, c’est le mensonge… cela seulement !… Ah ! le voilà bien le résultat de ton beau mensonge, hein ?… Quelle infamie !… Tu as caché cela avec toutes les hypocrisies, peut-être pendant des mois, je n’en sais rien, des années !… comme la dernière des coquines, comme une pauvre fille méprisable que tu es. Et, c’est inimaginable, tu avais l’aplomb de me reprocher tout à l’heure, doucement, plaintivement et dans quels termes, le… (S’interrompant.) Ah ! quelle atmosphère hideuse tu accumulais autour de nous ! (Geneviève, peu à peu, s’est reprise. Elle est accoudée à la cheminée. Elle a maintenant en mains la photographie. Elle écoute. On peut suivre sur son visage toutes les phases d’une lutte intérieure.) Heureusement tout s’arrange… Si tu croyais me faire quelque chose en t’en allant ! Pars, pars, ce n’est pas toi qui me quittes, c’est moi qui te chasse. Je vais donc pouvoir enfin vivre sans ton fardeau !… sans ton ennui !… Veux-tu savoir ? J’en ai assez de nous jusqu’à l’écœurement.

(Ils sont visage à visage.)
GENEVIÈVE.

Je comprends ça !…

ANDRÉ.

Regarde-moi… Notre amour, entends-tu ? ce n’était plus rien ! rien ! rien !