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LA POSSESSION




Heureux les auteurs qui, séduits par une situation dramatique, accueillent et traitent «le beau sujet» de rencontre, sans souci de plus impérieuses suggestions ! Leur tâche est sans doute souriante ; ils connaissent le plaisir du caprice imprévu. Personnellement, je fais partie de ces écrivains qui, obéissant à un plan général, considèrent leurs ouvrages, non point chacun isolément, mais d’ensemble, dans leurs relations entre eux ou dans leurs antithèses. Le public, lui, juge la pièce qu’on lui présente (il serait bien empêché d’ailleurs de faire autrement !) ; il se soucie fort peu que notre point de vue d’auteur diffère du sien et qu’une héroïne nouvelle soit, à nos yeux, le complément ou le contraste même d’un personnage précédent… Cependant, nous poursuivons une recherche globale ; nous sommes hantés plus ou moins par certain idéal, par une idée autour de laquelle pivotent nos ouvrages. Cet idéal, cette recherche opiniâtre suscitent en nous des différences de points de vue, qui se renouvellent incessamment, en agrandissant notre champ de conscience et d’observation ; ils stimulent l’imagination et cet esprit de philosophie, dont il est difficile aux œuvres d’art de se passer. Mais, dans ce cas, quelle est la méthode de travail et d’inspiration qui en résulte pour nous ? Celle-ci : c’est que