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direction du bureau. Au bout d’un moment il tourne la tête.) Ah ! c’est vous !… Chut…

MADEMOISELLE TIGRAINE, (à voix basse.)

Ne vous dérangez pas… Je peux trier le courrier ?

BARNAC, (faisant signe que oui.)

Chut !… (Silence très long. On n’entend que le bruit des feuilles de papier que range la secrétaire. Barnac, sortant peu à peu de sa méditation, machinalement.) Comment va votre mère ?

MADEMOISELLE TIGRAINE, (toujours à voix basse.)

Merci… encore très mal… Le médecin m’a dit que le mouvement de la jambe ne reviendra pas…

(Il lui fait signe encore de se taire, d’un geste vague de la main. Elle reprend le courrier.)
BARNAC, (refermant tout à coup le livre avec décision.)

Allons-y… (Il jette avec bruit le livre sur la table et changeant tout à fait de ton, revenant à la vie extérieure.) Alors… ça ne va pas ?… Mais, dites-moi, quand vous n’êtes pas près d’elle ?…

MADEMOISELLE TIGRAINE.

Oh ! depuis huit jours, j’ai pris une garde… c’est-à-dire pas tout à fait une garde… Je me suis entendue avec une voisine…

BARNAC, (tirant un billet de son portefeuille.)

Tenez… je vous prie d’accepter ces cinq cents francs-là, mon enfant… Je veux que vous fassiez venir une garde de métier…

MADEMOISELLE TIGRAINE.

Oh ! non… je ne peux pas accepter… Si j’avais su, je n’aurais rien dit…