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idées subversives qui faisaient pleurer ma mère… J’avais des remords affreux de lui faire de la peine ! Eh bien ! quand même, c’était plus fort que moi… Il fallait que je me débarrasse de mon désir d’insubordination !… Et encore maintenant… maintenant, je sens que ce petit livre-là va m’enlever à jamais le cœur de ma fille, que nous ne nous reverrons peut-être jamais… qu’elle m’en voudra pour le reste de ses jours… j’en éprouve un déchirement atroce !… eh bien, ce serait à refaire… je le referais !

GIBERT.

Oui, la force des idées !… C’est bien celle-là qui entraîne les peuples et qui fait marcher le monde… C’est notre force centrifuge, à nous autres, les esprits conducteurs.

MADAME DARTÈS, (avec un lourd soupir.)

Notre force ou notre faiblesse ?

GIBERT.

Non, notre force, et vous allez le voir… Vous allez voir le résultat du pavé rouge !

MADAME DARTÈS.

Puissiez-vous dire vrai !… Adieu !

GIBERT.

Quelques exemplaires, ma chère !

MADAME DARTÈS.

Oh ! non, merci !… pas un !… Voilà un livre que je ne relirai jamais par exemple ! Non, d’ailleurs, je n’ai pas l’envie de lire quoi que ce soit, je vous jure bien… Je vais rentrer chez moi, prendre une tasse de thé… je m’étendrai sur une chaise longue et demain matin, Gibert, demain