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MADAME DARTÈS.

Oh ! c’est d’une cruauté, ce que tu dis là !… Est-ce que tu t’en rends bien compte, Renée ?… C’est tout simplement atroce !

RENÉE, (sourdement.)

Laquelle est la plus atroce de nous deux ?

MADAME DARTÈS.

Alors, dans ton cœur… ton père seul compte !… Je ne suis rien, moi ?…

RENÉE.

Lui d’abord !… Lui, par-dessus tout !… Vous l’avez voulu ainsi !

MADAME DARTÈS.

Malheureuse !…

RENÉE.

Lui, qui a eu toutes mes pensées !… Lui, qui n’a pas été aimé par toi !… Lui, qui n’a pas eu sa part d’amour, et qui la méritait pourtant parce qu’il avait toutes les dignités, toutes les bontés !… Lui, que je vénère !…

MADAME DARTÈS, (les mains aux oreilles.)

Cruelle !… va, continue… Chaque mot est un coup de couteau !

RENÉE.

Lui, de qui je tiens ce qu’il y a de meilleur en moi !…

MADAME DARTÈS, (bondissant.)

Mais ce n’est pas vrai !… Tu es mon sang aussi !… Tu es ma fille !… Ce que tu as de bon, ce que tu as de meilleur en toi, tu me le dois !… Tu es ma fille, entends-tu ?