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AILES OUVERTES

furent les blouses que l’on pique jusqu’à ce que les doigts frémissent d’impatience, que les yeux vous brûlent de fatigue… Blouses d’infirmières… blouses de docteurs… que de métrages de tissu… que de kilomètres de fil j’ai vu défiler sur le rythme de mon premier moteur !… Mais celui-là n’avait jamais de panne… Il fallait vivre…

L’argent rentrait tout de même, à force d’obstination et de travail. C’est à ce moment-là que ma mère s’avisa de me faire donner des leçons de violon. Des leçons de violon… à moi qui n’ai pas d’oreille et qui chante faux !…

Pauvre chère maman, si bourgeoise dans ses idées, si traditionnaliste !… Elle ne s’habituait pas à ne pas faire de moi une jeune fille accomplie !…

… Les années qui suivirent m’apportèrent peu à peu — et parfois cruellement, — l’expérience de la vie… Mon premier mariage… la naissance de mon fils… Que de responsabilités pour mes trop jeunes épaules !… Que de déceptions aussi, que de peines qui me trem-