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AILES OUVERTES

souliers que ma mère me rapporta un jour avec cette recommandation ultime :

— Et surtout, ménage-les !

Hélas !… lorsque je revins au bercail, à la fin de la journée, mes souliers n’avaient plus de bouts… Nous avions passé l’après-midi à jouer au football !…

… Jusqu’à dix ans, j’avais été en classe une bonne élève. Après la mort de mon père, tout changea et j’étais royalement dernière… Ma mère, fort occupée par ailleurs à se débrouiller pour nous, traitait ma paresse d’écolière avec négligence et je pouvais impunément m’offrir le luxe de ne rien faire.

Un jour pourtant, lors d’une distribution de prix de fin d’année, je m’avisai que j’étais en queue du peloton. J’avais réuni les plus mauvaises places. « Madame » eut, en me nommant, un air de pitié dédaigneuse, mes compagnes, des sourires si pleins d’une ironie condescendante, que je sentis le rouge de la honte, pour la première fois, envahir mes joues. Je serrai les poings :

— Riez toujours !… On verra bien !…