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1630. mars.

lieres ; que ce sont de sy puissans princes qu’il estoit tres perilleux de les offenser, et en un temps ou ils avoint tant d’armées sur pié, sy voysines de la Suisse, et dans ses entrailles mesmes au païs des Grisons ; que je voulois par cet artifice jetter les Suisses en guerre avec la maison d’Austriche et les necessiter de se mettre entre les bras de la couronne de France ; que la Suisse se devoit conserver dans une esgale balance entre les deux couronnes, qu’autrement elle periroit ; et plusieurs autres choses qu’ils dirent sur ce sujet. Les autres affectionnés a la France disoint que, lors que les ambassadeurs d’Espaigne convoquoint des assemblées a Lucerne, ceux de France ne les y venoint point troubler ; que les Espagnols n’avoint aucune affaire maintenant avec eux, sinon de restituer la liberté aux Grisons leurs alliés, qu'ils leur detenoint injustement ; qu’ils n’avoint que faire de venir troubler les diettes quy ne leur touchoint point, quy n’estoint convoquées par eux, ny pour eux, et que j’avois rayson de ne le souffrir pas ; qu’au reste je parlois en sorte qu’il n'y avoit rien a dire, puis que j'offrois de quitter cette diette audit ambassadeur de la maison d’Austriche, me reservant a en convoquer une autre quelque temps apres, et que l’assemblée ayant l'alternative de conferer cette diette pour l’un ou pour l’autre, que c’estoit a elle a choisir, et que l’on devoit demander les voix pour sçavoir auquel elle la donneroit, rejettant l’autre et le remettant a une autre fois.

Apres les contestations on en vint aux opinions lesquelles passerent en ma faveur. Lors les factionnaires d’Espaigne se voyans forclos, proposerent que l’assemblée me prieroit de consentir que cet ambassadeur eut