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journal de ma vie.

a arriver le samedy 2me jour de mars, et le lendemain tous les autres vindrent par leurs deputés, quy me vindrent saluer, chasque canton l’un apres l'autre.

Le lundy 4me toute l’assemblée en corps, apres s’estre entre salués, et pris leurs seances, se leverent et vindrent tous les deputés avec leurs massiers devant, me saluer en mon logis.

Ce jour là le chancelier d’Alsasse ambassadeur de toute la maison d’Austriche, arriva a Solleure sans me rien mander ny envoyer visiter, contre la coustume usitée des ambassadeurs. J’entrepris de luy faire reffuser audience de l’assemblée, dont Mr de Leon tascha tant qu’il peut de me dissuader, disant que je ne pourrois le faire et que l’affront nous en demeureroit. Neammoins me confiant sur le grand credit que j’ay en Suisse, et sur mon industrie a traitter avec ces peuples, j'opiniatray cette affaire, et l’entrepris. Pour cet effet je fus premierement trouver l’avoyer de Rooll mon bon amy, et quy manie son canton comme il veut, et estoit president de l'assemblée. Il me dissuada tant qu’il peut de m’amuser a cela, me disant que je n’obtiendrois jamais cela de l’assemblée, ce quy fit que Mr de Leon insista davantage a m'en faire desister, et mesmes employa le resident de Venise a me le dissuader. L’avoyer de Rooll me dit : « Quant a ce quy est de mon canton, je vous en promets les voix ; mais aucun des autres ne s’y portera. » Sur cette asseurance j'envoyay querir les deputés du canton de Glaris en quy je me fiois fort ; car ils m’estoint obligés. Ils trouverent cette entreprise hardie, nouvelle, et de difficile execution, et me la dissuaderent, m’asseurant neammoins des trois voix de leurs deputés. J’avois au can-