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journal de ma vie.

d’Erlach Castelen le dessein de se jetter dans les quattre jurisdictions au deça du mont Arberg, que l’on nomme vulgairement les quattre villes forestieres appartenantes a la mayson d’Austriche, quy sont Reinfeld, Sekinguen, Laufenbourg, et Valdshout[1], lesquelles, pour avoir esté prises et reprises pendant ces guerres, estoint comme abandonnées a premier occupant ; que depuis deux ans on y avoit semé, joint aussy qu’il y avoit des ponts sur le Rein, quy estoit ce qu’il devoit desirer, et qu’au delà il auroit foyson de vivres dans l’Alsats delà le Rein quy s’estoit en quelque sorte raccommodé. À cela se presentoit la difficulté de l’entreprendre, veu qu'il y avoit quattre generaux quy se pourroint rassembler, quy joints ensemble, estoint sans comparayson plus forts que luy : mais elle fut surmontée par la facilité de l’entreprise et de l’execution, par l’asseurance du secours que l’on luy promettoit de France, et par la necessité de ne pouvoir où aller ailleurs ; de sorte qu'il s’y resolut, et des la fin de fevrier s'achemina a Laufenbourg qu’il prit avec peu de resistance, comme il fit aussy Valdshout et Sekinguen, puis s’en vint assieger Reinfeld. Cette inopinée invasion resveilla les chefs du party de l’empereur, et se joygnirent pour se venir opposer a luy le duc Savelly, Jean de Vert, Equenfort, et Sperreuter, quy vindrent un matin[2] fondre sur luy comme il estoit occupé a ce siege qu'ils luy firent lever en desordre, ayans jetté mille hommes dans Reinfeld, tandis que

  1. Rheinfeld et Laufenburg sur la rive gauche du Rhin, Seckingen et Waldshut sur la rive droite ; ces quatre villes entre Schaffhouse et Bâle.
  2. Le 28 février.