Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 3.djvu/69

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
65
1622. juin.

d’embraseure, et qu’il luy resteroit toujours assés de cette meschante muraille pour tenir ses officiers a couvert. Il n’y avoit dans Negrepelisse rien au dessus du mousquet, autre munition de guerre que celle que chasque habitant en pouvoit avoir pour gibboyer ; nul soldat estranger, nul chef quy les commandat ; la place mediocrement bonne pour une armée de province, mais nullement capable de resister a une armée royale : et cependant les habitans ne voulurent jammais se rendre, non pas mesmes parlementer, quoique l’on leur en eut souvent secoué la bride, car nous n’avions pas envie de nous arrester là.

Le jeudy 9me je fis rapport au conseil du lieu que nous avions reconnu propre a battre la place, que j’avois montré a Mr de Chomberg dès quattre heures du matin, ce quy fut resolu, et on y travailla tout le jour, et la nuit on y mit les sept canons que nous avions là. Mr le Prince y vint comme on les ammenoit, et comme il vit que Toiras et moy estions descendus dans le fossé de la ville, il s’y jetta aussy, bien que les ennemis y tirassent incessamment, mais sans effet ; car ils ne pouvoint pas plonger leurs mousquets sy bas.

Le vendredy 10me j’allay le matin aux autres quartiers de Picardie et Navarre, pour leur faire tenir des eschelles prestes a donner l’escalade par leurs costés, tandis que par celuy des gardes nous donnerions l’assaut sy ces coquins ne vouloint se rendre, et donnay l’ordre au regiment des gardes, qu’il devoit tenir pour l’assaut. La batterie fut preste sur les dix a onse heures du matin. Le roy estoit malade des le jour de devant ; neammoins il se vouloit lever pour voir