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1622. mai.

que le sieur de Refuges, brave gentilhomme, et aussy entendu et experimenté pour son aage que j’en aye jammais veu, infatigable au travail, toujours agissant, et entreprenant, et quy eut un jour esté, s’il eut vescu, un grand capitaine : je l’avois fait, dix jours auparavant, mon ayde de camp, et le roy a ma priere luy avoit donné une compagnie au regiment de Piemont.

Le mardy 10me, comme nous eumes leurs pieces destachées en nostre puissance, nous deschargeames a nostre ayse et sans peril la mine qu’ils nous avoint preparée, de laquelle nous tirasmes six cens livres de poudre. Les ennemis avoint fait une barricade dans leur fossé du costé de la mer et une palissade au devant, ce quy nous empeschoit d’estre entierement maitres de leur fossé. Je la fis reconnestre par mon volontaire quy estoit un jeune garçon de seise ans, quy entreprenoit des l’année precedente, avec d’autres goujats, des travaux hasardeux au siege de Montauban, que les soldats ne vouloint point accepter. Il avoit eu divers coups, et entre autres une mousquetade a travers du corps, dont je l’avois fait guerir. Ce coquin là entreprenoit a la tasche forces travaux perilleux, et les goujats du camp travailloint sous luy et gaignoint largement. Ce volontaire alla reconnestre cette barricade avesques le mesme port et aussy grande asseurance qu’eut sceu faire le meilleur sergent de l’armée. Une mousquetade luy perça ses chausses, et une autre le bord de son chapeau, et puis nous vint faire son rapport quy fut tres judicieux. Josepo Gamorini quy menoit nos travaux, et estoit en grande estime parmy nous, comme certes il la meritoit bien, fut d’avis que selon son opinion nous allassions forcer cette barricade et avec des