Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 3.djvu/336

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
332
journal de ma vie.

legers ; et moy je luy respondis que, sy il augmentoit mes trouppes, je ne l’entreprendrois pas. Il m’enquit là dessus quand je voudrois commencer. Je luy dis que le lendemain j’irois reconnestre et tracer le fort, que je me preparerois le samedy, et que le dimanche au matin je m’y irois loger. Il me dit qu’il ne pensoit pas que je le peusse faire sy tost, et puis me demanda avec combien de forces je m’y viendrois loger : « Avec quattre cens hommes de pié et quarante chevaux », luy dis je. Il dit allors que je me moquois, et qu’il ne me le souffriroit pas. Je luy repartis qu’il le feroit donc faire par un autre ; que je n’y voulois pas employer un homme davantage, et qu’il me laissat faire a ma fantaisie, ou que je quitterois tout là : ce que je faisois par despit de Mr d’Angoulesme quy estoit là. Lors je pris congé du roy quy me recommanda de prendre mes seuretés de telle sorte que luy, et moy en suitte, ne receussions point d’affront.

Le vendredy 19me je pris cinquante chevaux, et deux cens hommes de pié, et m’en vins reconnestre le lieu ou je ferois mon fort, que je fis tracer par un ingenieur nommé le Flamen ; puis je m’en revins. Par les chemins les ennemis me vindrent chicaner : je les fis pousser jusques dans leurs portes par la compagnie de la Roque Massebaut, quy y perdit d’un coup de mousquet son mareschal des logis, quy fut grand dommage.

Le samedy 20me le regiment des gardes et celuy de la Melleraye revindrent de Ré. Je logeay ce premier a Losieres, et l’autre a Lommeau.

Canaples ammena le millord Montjoye, son prisonnier, loger et coucher cheux moy, quy les laissay au