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journal de ma vie.

Sur ces entrefaites arriva la nouvelle a la court comme le baron de Papenheim quy gardoit Rives de Chiavennes avec son regiment d'Allemans avoit chassé les trouppes du roy de Verser et de Campo[1], les avoit deffaites, pris douse canons, et onse barques armées que nous avions sur le lac de Cosme, ce quy fascha fort le roy et le conseil. Mais peu de jours apres le marquis de Cœuvres envoya son secretaire quy asseura que le Papenheim n’avoit pas passé outre, et que les Venitiens avoint envoyé, sous Mr de Candale[2], des trouppes suffisantes pour le repousser.

Neammoins les serviteurs que le roy avoit en Suisse luy mandoint que les affections de ces peuples pour le roy estoint fort alterées, que plus de vingt cinq mille Allemans avoint eu passage ouvert par la Suisse pour aller servir l'Espagnol en Italie, et que nostre alliance en Suisse s’en alloit destruitte s’il n’y estoit promptement pourveu ; que le plus seur remede estoit de m’y envoyer, et que par la grande bienveillance que les Suisses me portoint je pourrois tout restablir. Les Venitiens et le duc de Savoye firent les mesmes offices pour m'y faire envoyer, et y firent acheminer leurs ambassadeurs et residens pour se joindre a toutes mes pratiques. Le roy pour ce sujet me força d’y aller son ambassadeur extreordinaire, ce que je fis par pure obeissance ; et l’on assista mon ambassade de deux cent cinquante mille escus que j’y portay pour y

  1. Verceja et Campo, petites places situées comme Riva di Chiavenna sur le bord du lac de Mezzola.
  2. Le comte de Candale passa plusieurs années au service de la république de Venise dont il fut le général en terre ferme.