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1622. aout.

neufve de Maguellonne pour favoriser son passage proche de Montpelier. Mrle Prince me fit voir ce commandement du roy, et me dit que Mr le comte d’Alais[1] colonel de la cavalerie legere estoit là, quy pourroit mener ces cinq cens chevaux, et que je viendrois avesques luy. Je luy respondis que c’estoit a luy a ordonner, que je n’avois aucune volonté. Il me dit qu’il manderoit au roy que j’avois mieux aymé venir avesques luy, et moy je le suppliay de n’en rien faire, parce que j’estois prest d’aller mener cette cavalerie au roy, et que Mr le comte d’Alais y pourroit venir, s’il vouloit, mais que je luy commanderois. Il me dit en suitte : « Faisons mieux : laissés y aller Mr de la Curée, quy est mareschal de camp et mestre de camp de la cavalerie legere. » Je luy respondis que j’en estois content. Il me dit lors : « Je manderay donc au roy que vous avés voulu venir avec moy. » J’entendis bien qu'il ne vouloit pas que j’allasse trouver le roy, et qu’il vouloit faire parestre que c’estoit moy quy ne le voulois pas, ce quy me fit luy dire : « Monsieur, je vous supplie tres humblement luy mander vostre volonté, et non la mienne ; car pourveu que je vous obeisse, j’ay ma descharge. Mais pour moy je suis prest d’aller

  1. François de Valois, comte d'Alais, troisième fils de Charles, bâtard de Valois, comte d’Auvergne, duc d’Angoulême, et de Charlotte de Montmorency. Le second fils du duc d’Angoulême était destiné à l’état ecclésiastique, et l’ainé, Henri de Valois, comte de Lauraguais, était tombé en démence, de sorte que le comte d’Alais devait succéder à son père, dont il tenait déjà la charge de colonel général de la cavalerie légère de France : mais ce jeune prince mourut le 19 septembre de cette même année 1622, sans enfants de son mariage avec Louise-Henriette de la Châtre.