Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 2.djvu/86

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
82
journal de ma vie.

deut faire ouverture du mariage de sa fille fut bien esbahie de voir une sy contraire harangue, et ne luy respondit qu’en paroles generales qu’elle donneroit ordre de contenir chascun en son devoir et en l’obeissance du roy, en telle sorte que le roy de la Grand Bretaigne ne seroit point en peine d’y intervenir.

Ce jour là je m’embarquay avesques Urfé[1] dont je devins en suitte fort amoureux.

Le dimanche 28me monsieur le nonce vint trouver la reine pour luy dire qu’il ne voyoit pas jour pour aucun accommodement avesques elle des princes, avec lesquels il avoit parlé, mais qu’il ne desesperoit pas de Mrs de Guyse freres, en cas que la reine fit quelques avances de bonne chere et principalement a madame la princesse de Conty leur sœur, quy avoit eu deux jours auparavant quelque prise avec la mareschalle d’Ancres, dont elle estoit animée. La reine le pria de continuer cette pratique et d’offrir a Mr de Guyse la charge de mareschal de camp general, en cas qu’il voulut quitter toutes pratiques avesques les autres.

Le mesme dimanche 28me la reine me commanda de faire demeurer les quattre compagnies suisses quy estoint destinées pour le siege de Peronne, et que quelque commandement que j’en eusse, par escrit ou verbal, d’elle ou du roy, quand mesmes l’un ou l’au-

  1. Dans les précédentes éditions il y avait une, au lieu de Urfé.
    Geneviève d’Urfé, fille de Jacques, marquis d’Urfé, et de Marie de Neufville, était fille d’honneur de la reine-mère. « C’estoit alors, dit Tallemant des Réaux, toute la fleur de chez la Reyne-mère : aussy fut-elle fort galantisée ; on en mesdisoit mesme un peu. » (Historiettes, t. III, p. 314.)