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1621. novembre.

trouva bon de loger ses gardes a Puch, d’ou je retiray vingt soldats que j’y avois mis.

J’ordonnay aussy que chasque regiment fermeroit jusques a celuy quy luy estoit voysin, d’une tranchée par laquelle il y eut communication a couvert de l’un a l’autre, et leur fis fournir d’outils. Je fis faire des gabions et dresser des platteformes, affin que des que nos canons que j’attendois seroint venus, nous les missions en batterie, et nous avançames des deux costés nos tranchées en toute diligence : elles n’estoint pas fort seures ny larges ; mais c’estoit un siege que nous devions desvorer sans le mascher.

Le dimanche 21me j’envoyay nos chevaux legers a la guerre vers Sainte Foy[1]. Nous avançames nos travaux jusques pres du fossé des ennemis lesquels me reconnoissoint aysement aller et venir, pour estre habillé d’escarlate, monté sur un bidet blanc, et a la croix de mon manteau. Ils me tendirent un piege pour me tuer en passant du quartier de Piemont a celuy de Normandie dont la ligne de communication n’estoit encores parachevée. Ils garnirent le bastion avancé de mousqueterie, comme ils firent aussy leur contrescarpe. Ils n’avoint qu’une seule piece de campagne dont ils me saluerent comme j’estois encores loin et

  1. Sainte-Foy-la-Grande, chef-lieu de canton de l’arrondissement de Libourne, sur la rive gauche de la Dordogne. Cette place importante par sa position était entre les mains de Théobon (Charles de Rochefort de Théobon, baron de Saint-Angel), beau frère du marquis de Mirambeau, qui tenait Monheurt. Il s’agissait d’empêcher ceux de Sainte-Foy de venir au secours de la place assiégée.