commanda a ceux a quy il avoit donné charge d’y prendre garde, de se confier à Mr de Guyse, et de luy donner avis s’ils apercevoint quelque chose.
Il arriva, un soir que j’y devois aller, et que l’on m’espioit, au mois de may, que, souppant cheux Mr le Grand, il vint a faire une forte pluye : ce quy m’obligea de prendre un des manteaux de pluye de Mr le Grand ; et sans penser que la croix de l’ordre estoit attachée dessus, je men allay sur les onse heures du soir au logis d’Antragues. Je fus suyvy par les espions du roy et ceux de Mr de Guyse, quy l’en vindrent aussy tost advertir, et luy dirent qu’ils avoint veu entrer un jeune chevalier du Saint-Esprit par une porte de derriere au logis de madame d’Antragues. Mr de Guyse ne le pouvoit croire, et y envoya deux de ses vallets de chambre pour voir et reconnoitre le chevalier quand il sortiroit, quy ne pouvoit estre que Mr le Grand, veu qu’il n’y avoit que luy de jeune chevalier a Paris, capable d’avoir cette bonne fortune. Je vis bien, en sortant, ces deux vallets de chambre que je connoissois, et pour cela je me desguisay le plus que je peus, croyant qu’infailliblement ils m’auroint descouvert : mais eux, voyant cette croix du Saint-Esprit, jugerent que c’estoit Mr le Grand, et en asseurerent Mr de Guyse. J’escrivis aussy tost a Antragues que les vallets de Mr de Guyse m’avoint veu sortir, que je craignois que nous ne fussions descouverts ; et qu’elle inventat quelque excuse ou change, sy il luy en parloit.
Sur les neuf a dix heures du matin Mr de Guyse, quy avoit la puce a l’oreille, vint voir Mr le Grand : mais on luy dit à la porte qu’il avoit toute la nuit eu un grand mal de dents, et que l’on ne le verroit que sur le soir ;