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JOURNAL

Lundi 28 janvier. — Le concours sera jugé demain ; j’ai si peur d’être mal placée… !


Mardi 29 janvier. — J’avais une telle peur du concours, qu’il fallut des efforts surhumains à cette pauvre Rosalie pour me faire lever.

Je m’attendais à recevoir la médaille ou à n’être classée que parmi les toutes dernières.

Ni l’un ni l’autre. Je suis restée à la même place qu’il y a deux mois ; par conséquent, c’est un four.

Je suis allée voir Breslau, qui est toujours malade.


Mardi 12 février. — On m’a trompée sur l’heure pour me prendre ma place, et puis une Espagnole et deux autres ont assuré qu’elles ne m’avaient rien dit et que je m’étais trompée moi-même. Ce mensonge, comme tous les mensonges, m’a révoltée d’autant plus que, je dois le dire à la louange de l’espèce humaine, celles que j’avais défendues lors de l’affaire des Suissesses, n’ont seulement pas prononcé un mot pour dire que j’avais raison.

Je le dis pour qu’on le sache ; autrement je n’ai pas besoin de protection, ne criant que lorsque je suis dans mon droit.

Ce matin déjà je ne pouvais pas du tout travailler, je ne voyais rien ; et, l’après-midi, Berthe est venue et je me suis donné congé.

Ce soir, aux Italiens, on chantait la Traviata : Albani, Capoul et Pandolfini. Grands artistes, mais cela ne m’a pas plu ; pourtant au dernier acte j’avais non pas envie de mourir, mais je me disais que j’allais souffrir et mourir au moment où tout pourrait s’arranger.

C’est une prédiction que je m’offre. J’étais habillée