Page:Bashkirtseff - Journal, 1890, tome 2.pdf/22

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
17
DE MARIE BASHKIRTSEFF.

autre ferait en deux ans, elle le fera en six mois. C’est tout ce qu’il y a de plus faux.

Il ne s’agit pas de vitesse. À ce compte-là, il n’y aurait qu’à y mettre le temps. Sans doute, avec de la patience, on arrive à un certain résultat. Mais ce que je ferai, moi, au bout d’un ou deux ans, la Danoise ne le fera jamais. Quand je me mets à redresser les erreurs humaines, je m’embrouille et m’agace, parce que je n’ai jamais le temps de finir une phrase commencée.

Bref, si j’avais commencé il y a trois ans, je pourrais me contenter de six heures par jour ; mais à présent, il m’en faut neuf, dix, douze, autant que possible enfin. Certes, même en commençant il y a trois ans, je ferais mieux de travailler autant que possible, mais enfin, ce qui est passé… assez !…

Gordigiani m’a dit avoir travaillé douze heures par jour.

De vingt-quatre heures prenons sept heures pour dormir, deux pour se déshabiller, prier Dieu, se laver les mains à différentes reprises, s’habiller, se coiffer, tout ça enfin ; deux pour manger et respirer un peu, cela fait onze heures.

C’est que c’est vrai, il en reste treize.

Oui, mais les trajets, pour moi, me prennent une heure et quart.

Eh bien, oui, je perds trois heures à peu près.

Quand je travaillerai chez moi, je ne les perdrai plus. Et puis… et puis, s’il y a du monde à voir, la promenade, le théâtre ?

Nous tâcherons d’éviter tout cela, car au degré où je puis en jouir, ce n’est qu’un ennui.


Jeudi 18 octobre. — Mon académie a semblé si bien à Julian, qu’il a dit que c’était tout à fait extraor-