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JOURNAL

ainsi plusieurs fois. Voici le récit, qui, pour n’être pas aussi classique que celui de Théramène, n’est pas moins intéressant, assaisonné d’un accent niçois qui n’est pas sans charme :

« Je suis descendu chercher du papier ; alors ce monsieur m’a parlé. Il m’a dit : Est-ce que c’est ici où demeurent ces dames ? Je lui ai dit : Oui. Alors il m’a dit : « Si elles voulaient visiter ma villa, je leur enverrais un coupé ou un landau, ce qu’elles voudraient. » Alors, je lui ai dit que vous ne le connaissiez pas, Alors il m’a dit que si, que vous le connaissiez. « La mère de ces demoiselles me connaît et nous nous rencontrons tous les soirs, à la villa Borghèse et au Pincio. » Alors je lui ai parlé tant, qu’il m’a donné sa carte. Alors je vous l’ai portée et je suis descendu. Il m’a de nouveau parlé. Alors je lui ai dit que les dames m’ont défendu de parler, et alors il m’a dit : « Je vais à la maison faire une lettre ; dans une demi-heure, je reviendrai et vous descendrez pour la prendre. » Alors je lui ai dit que je ne pouvais pas descendre à chaque instant. Alors il m’a dit : « Que les dames laissent pendre un fil auquel j’attacherai ma lettre et elles l’attireront sur le balcon. Est-ce que ces dames ont du fil ? » Alors je lui ai dit que vous ne le connaissiez pas. Alors, il m’a dit : « Mais que ces dames disent par qui je puis leur être présenté, et j’irai trouver cette personne. » Alors je ne lui ai rien dit ; alors il m’a dit que c’était pour la demoiselle qui était hier à la villa Borghèse, en noir, avec des cheveux pendants (c’était Dina). Alors il m’a dit que si vous voulez visiter sa villa, il y fera rester du monde et ira vous la montrer, et si vous voulez, il vous enverra sa voiture… »

Il fallait voir cette mine de Fortuné, les mains croisées derrière le dos, un pied en avant, la bouche